Les conditions sociales et économiques au Royaume-Uni sont très difficiles au début du 19e siècle. La pauvreté, le chômage, la surpopulation des campagnes, les mauvaises récoltes et les épidémies touchent l’ensemble du Royaume-Uni. Cependant, l’Irlande est plus durement affectée par les mauvaises récoltes, ce qui entraine une famine au sein de la population.
Afin de régler ces problèmes, le gouvernement britannique encourage fortement ses habitants à émigrer dans ses colonies d’Amérique du Nord, notamment au Bas-Canada, où il désire augmenter la proportion d’habitants d’origine britannique. Pour ce faire, le gouvernement octroie aux migrants des terres dans les cantons des deux Canadas. Des agents d’immigration font la promotion de l’émigration vers les colonies auprès des habitants du Royaume-Uni. Ils ont aussi la tâche d’organiser leur transport et leur établissement. Dès 1815, des milliers d’Anglais, d’Écossais et d’Irlandais entament la traversée vers l’Amérique du Nord dans l’espoir d’y trouver de meilleures conditions de vie.
-
On parle d’émigration lorsqu’une personne quitte son pays (pays de départ) afin d’aller s’installer dans un autre pays (pays d’accueil) pour une période déterminée ou de manière permanente.
-
On parle d’immigration lorsqu’une personne arrive dans un pays étranger (pays d’accueil) pour s’y installer de manière temporaire ou définitive.
Pour mieux comprendre le concept de migration, tu peux regarder la vidéo La migration.
Source des données : Cowan, H.I., 1975.
Souvent, les immigrants britanniques font la traversée de l’Atlantique sur des navires qui ont transporté du bois des colonies vers la métropole. L’eau potable et la nourriture ne s’y trouvent pas toujours en quantité suffisante. Ils sont généralement entassés les uns sur les autres dans de petits espaces insalubres et mal aérés. Ces conditions favorisent la propagation parfois très rapide de maladies telles que le choléra et le typhus. Certains immigrants ne survivent pas à cette traversée.
L’intérieur d’une cabine pour les immigrants lors de la grande traversée de l’Atlantique
Source : Un bateau d’immigrants - L’intérieur des cabines [impression], The illustrated London News, 1851, Bibliothèque et Archives Canada, (URL).
De plus, les années 1830 sont marquées, en Europe, par une épidémie de choléra. Étant donné que le Bas-Canada est la porte d’entrée pour les immigrants, les Canadiens craignent que ces nouveaux arrivants soient porteurs de maladies. Ainsi, en 1832, le gouvernement du Bas-Canada met en place un lieu de quarantaine à la Grosse-Île. À leur arrivée, les immigrants malades (ou qui présentent des symptômes) sont isolés à la Grosse-Île, où ils resteront en moyenne de 7 à 15 jours. Malgré cette mesure, le choléra se propage tout de même dans les colonies. Seulement durant l’année 1832, le choléra fait entre 8 000 et 12 000 morts au Bas-Canada.
Lieu historique national de la Grosse-Île-et-le-Mémorial-des-Irlandais
Source : Grosse Île [Photographie], Cephas, 18 juillet 2013, Wikimedia commons, (URL). CC BY-SA 3.0.
La plupart des immigrants britanniques se dirigent vers le Haut-Canada ou les États-Unis. Toutefois, environ 50 000 d’entre eux s’installent au Bas-Canada, notamment dans les villes de Québec et de Montréal, ainsi que dans les Cantons-de-l’Est. Les autorités coloniales octroient d’ailleurs des terres dans les Cantons-de-l’Est. De plus, une compensation financière est accordée aux immigrants qui s’installent au Bas-Canada, toujours dans l’optique d’augmenter le nombre d’anglophones dans la colonie.
Au Bas-Canada, les Canadiens français, majoritairement agriculteurs, sont confrontés à une surpopulation des seigneuries ainsi qu’à une crise agricole. Bon nombre d’entre eux ne peuvent plus subvenir à leurs besoins et décident de quitter les seigneuries de la vallée du Saint-Laurent. Trois possibilités s’offrent à eux :
- émigrer vers les États-Unis;
- migrer vers les villes de la colonie;
- coloniser de nouvelles régions.
Du milieu du 19e siècle au milieu du 20e siècle, autour d’un million de Canadiens français émigrent vers les États-Unis, notamment en Nouvelle-Angleterre (Vermont, New Hampshire, Maine, Massachusetts, Rhode Island et Connecticut). Dans ces États, la demande en main-d’œuvre dans les industries est plus forte, ce qui facilite l’accès à un emploi pour les Canadiens français. Ces derniers se regroupent souvent dans ce qu’on appelle des Petits Canadas où ils préservent, pendant quelques générations, la culture canadienne-française.
Même si la population demeure majoritairement rurale jusqu’au 20e siècle, les villes connaissent un développement important durant le Régime anglais. En effet, des milliers de Canadiens français quittent la campagne dans l’espoir de trouver du travail en ville, notamment dans les chantiers, les moulins à scie et les manufactures. Or, les conditions de vie et de travail en ville sont difficiles et les emplois y sont plutôt rares. Ainsi, l’augmentation de la population causée entre autres par l’immigration irlandaise entraine des tensions entre les deux groupes ethniques qui convoitent les emplois d’ouvriers.
Source : Vue de la Côte du Beaver Hall; la rue Craig en avant-plan. À gauche, on peut voir l’église de Sion des Congrégationistes; au centre l’église Saint-Andrews complétée en 1851; et à droite la cathédrale - Bas-Canada [Photographie], vers 1851, Bibliothèque et Archives Canada, (URL).
Le départ des Canadiens français vers les villes ou les États-Unis déplait à l’Église catholique, qui craint l’exode de ses fidèles dans un pays protestant. De plus, aux yeux du clergé, l’agriculture et le traditionalisme doivent être préservés. Ainsi, l’Église catholique s’associe au gouvernement colonial et, ensemble, ils tentent de freiner l’exode des Canadiens français en leur vendant, à petits prix, des terres dans de nouvelles régions de colonisation. Ces nouvelles régions sont les Laurentides, le Saguenay, la Mauricie, l’Outaouais et le Témiscamingue. Malgré l’obtention de nouvelles terres, il arrive fréquemment que les colons ne soient pas en mesure de subvenir aux besoins de leur famille toute l’année. Pour y parvenir, ils doivent souvent se résoudre à travailler dans les chantiers forestiers pendant l’hiver.
Jusqu’en 1842, l’exploitation forestière du territoire du Saguenay est sous le monopole de la Compagnie de la Baie d’Hudson et cette dernière ne souhaite pas que ce territoire soit développé par les colons. La compagnie exploite le territoire pour ses ressources forestières. Cependant, la Compagnie n’a pas d’autres choix que de demander de l’aide à des groupes afin de réussir à exploiter le territoire. Ainsi, la Compagnie permet à une société d’exploitation forestière, communément nommée la Société des vingt-et-un, d’exercer ses activités, mais leur refuse le droit de défricher les terres pour s’installer sur le territoire du Saguenay. Malgré cette interdiction, entre 1838 et 1842, des engagés de la Société des vingt-et-un et leur famille commencent à défricher des terres dans le but de s’y installer. La Compagnie de la Baie d’Hudson tente de les en empêcher, mais sans succès. Lors du renouvèlement du bail accordé à la compagnie, le gouvernement le modifie et met des terres agricoles du Saguenay aux enchères. La colonisation de cette région peut alors prendre de l’ampleur.
Si tu veux en savoir plus, consulte l’article du Répertoire du patrimoine culturel du Québec Arrivée de la Société des vingt-et-un au Saguenay.
Cephas. (2013, 18 juillet). Grosse-Île [Photographie]. Wikimedia commons. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Grosse_Ile.jpg
Cowan, H.I. (1975). L’immigration britannique avant la Confédération. La société historique du Canada. https://cha-shc.ca/_uploads/5c38bee499ec3.pdf
Lisle, R. (Vers 1851). Vue de la Côte du Beaver Hall; la rue Craig en avant-plan. À gauche, on peut voir l’église de Sion des Congrégationistes; au centre l’église Saint-Andrews complétée en 1851; et à droite la cathédrale - Bas-Canada [Photographie]. Bibliothèque et Archives Canada. https://www.bac-lac.gc.ca/eng/CollectionSearch/Pages/record.aspx?app=FonAndCol&IdNumber=3622919
The illustrated London News. (1851). Un bateau d’immigrants - L’intérieur des cabines [impression]. Bibliothèque et Archives Canada. https://www.bac-lac.gc.ca/eng/CollectionSearch/Pages/record.aspx?app=FonAndCol&IdNumber=2956054