Le chiasme est une figure de style d’opposition qui consiste à rapprocher deux énoncés, ayant parfois des sens opposés, en les mettant en parallèle selon une structure AB-BA. On peut retrouver cette figure de style dans différents types de textes.
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« Un pour tous, et tous pour un. »
— Les trois mousquetaires, p. 43, Alexandre Dumas[1] -
« Je ne sais pas
de quoi est fait un jour
la nuit tard
me l’apprend »
— L’œil soldat, p. 11, Larry Tremblay[2] -
« […] il faut manger pour vivre et non vivre pour manger. »
— L’Avare, p. 99, Molière[3]
Pour repérer un chiasme, il faut porter une attention particulière aux phrases ou aux vers qui respectent le modèle AB-BA. On y retrouve donc deux énoncés similaires, mais construits de manière inversée, qui sont souvent juxtaposés ou coordonnés.
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« Pourquoi ceux qui veulent nous sauver, nous perdent, et ceux qui ont voulu nous perdre, finissent toujours par nous sauver […]. »
— Forêts, p. 49, Wajdi Mouawad[4]Dans cet extrait de pièce de théâtre, la phrase est composée de deux énoncés coordonnés qui contiennent des groupes de mots similaires, nous sauver (A) et nous perdre (B), placés de manière inversée selon le modèle AB-BA.
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« “la petite a tué son amour parce que l’amour l’a tuée” »
— Poupée de rouille, p. 106, David Ménard[5]Dans cet extrait de conte, la phrase est composée de deux énoncés coordonnés qui contiennent des groupes de mots similaires, a tué (A) et amour (B), placés de manière inversée selon le modèle AB-BA.
Les éléments inversés peuvent être de sens opposés (antonymes). Lorsque c’est le cas, le chiasme contient également une antithèse.
Ex. :
« Un roi chantait en bas, en haut mourait un dieu. »
— La légende des siècles, Victor Hugo
A | B | B | A |
Un roi chantait Cette expression est opposée à l’expression mourait un dieu. |
en bas Cette expression est opposée à l’expression en haut. |
en haut Cette expression est opposée à l’expression en bas. |
mourait un dieu Cette expression est opposée à l’expression Un roi chantait. |
Le chiasme est une figure d’opposition qui crée un effet de contraste entre des énoncés rapprochés. D’ailleurs, parfois, le fait que les éléments soient placés dans l’ordre inverse change leur signification. Ainsi, le chiasme peut faire ressortir, entre autres, un thème, une caractéristique d’un personnage ou une situation paradoxale. Il peut également créer un rythme intéressant dans un texte.
Lorsqu’on interprète un chiasme, il faut émettre une hypothèse sur son sens en faisant un lien entre l’effet créé par les énoncés opposés et le contexte de l’œuvre. Voici un exemple de question d’interprétation portant sur un extrait de texte et des pistes de réponses possibles.
Dans cet extrait du roman La chute de Sparte, le narrateur adolescent, Steeve, explique sa passion pour la lecture d’œuvres écrites par de grands auteurs. Il apporte toutefois une petite nuance dans ses propos. Selon toi, qu’est-ce que le chiasme employé permet d’illustrer?
« On lit parce qu’on est seul, mais on peut être seul parce qu’on lit. C’est que la lecture stimule la curiosité, la mémoire, le vocabulaire, la culture générale. Les profs aiment ça, mais pas les élèves. Je dois faire attention de ne pas trop étaler mes connaissances en public. »
— La chute de Sparte, p. 29, Biz[6]
Pistes de réponses possibles
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Mise en parallèle de la lecture et de la solitude
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Opposition entre un avantage et un désavantage de la lecture
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Mise en évidence du rejet possible à cause de la lecture
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Démonstration du paradoxe que vit le narrateur
Selon moi, le chiasme, qui met en parallèle la lecture et la solitude, permet d’illustrer la perception paradoxale qu’a le narrateur par rapport à la lecture. En effet, il affirme que, d’un côté, la lecture est un compagnon lorsqu’on est seul et, d’un autre côté, que la lecture peut nous rendre seul, donc nous isoler davantage. On peut donc en comprendre que les autres semblent rejeter les gens qui pratiquent ce passetemps, peu populaire chez les jeunes, mais qu’il s’agit également d’un bon moyen de s’occuper lorsqu’on est seul. Ainsi, le chiasme montre bien l’opposition entre l’amour de la lecture pour le narrateur et sa méfiance à l’étaler.
Il existe d’autres figures d’opposition.
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Dumas, A. (1981). Les trois mousquetaires. Éditions École des loisirs.
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Tremblay, L. (2019). L’œil soldat. Éditions La Peuplade.
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Molière. (2004). L’Avare. Éditions Larousse-Bordas.
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Mouawad, W. (2006). Forêts. Leméac Éditeur.
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Ménard, D. (2018). Poupée de rouille. Éditions Interligne.
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Biz. (2011). La chute de Sparte. Leméac Éditeur.