Cette fiche se concentre sur l’aspect économique de la Grande Dépression et ses causes.
Pour en savoir plus sur le sujet, tu peux également consulter la fiche sur le krach boursier et la Grande Dépression.
Après la Première Guerre mondiale, la population se réjouit, tant par le retour des soldats, attendu depuis longtemps, que par la forte croissance économique. Cette dernière est stimulée par la hausse de consommation causée par la fin de la guerre. Les gens recommencent à vivre sans les craintes ni le rationnement (le contrôle de la consommation de certains biens) vécus lors de la guerre. Pour une partie de la population, la mode est au luxe : vêtements, croisières, arts, musique jazz, danse, etc.
Les Années folles sont aussi une période d’émancipation pour les femmes, qui s’approprient leur corps : plusieurs se maquillent, fument en public, portent les cheveux courts, etc. Le modèle de la femme garçonne fait alors sensation.
Portrait réalisé par le photographe Walery en 1926
Source : Fernande, Wikimedia Commons
Dans le domaine scientifique, en ce début de 20e siècle, Sigmund Freud expérimente ses théories sur l’inconscient ainsi que la psychanalyse et Albert Einstein révolutionne la science avec sa théorie de la relativité.
Par Max Halberstadt, photographe
Source : JasonAQuest, Wikimedia Commons
Par Ferdinand Schmutzer, photographe
Source : Yann, Wikimedia Commons
De son côté, l’économie américaine a de grands impacts sur le monde occidental. Le modèle économique américain est appliqué partout en Europe. Le système de production industrielle profite de l’organisation du travail de Taylor et les consommateurs profitent des achats et des investissements à crédit, c'est-à-dire qu’ils empruntent de l’argent pour pouvoir acheter ou investir.
La prospérité des États-Unis augmente depuis la Première Guerre mondiale. Les grands empires européens sont durement touchés par les conséquences de cette grande guerre et leur économie a de la difficulté à se reconstruire. Dans ce contexte, l’économie américaine prend de plus en plus de place dans l’économie mondiale. La production du pays va bon train. Comme les produits américains sont vendus à travers le monde, cela enrichit beaucoup l’économie américaine. Elle devient l’une des premières économies mondiales.
La prospérité est le fait d’avoir un bon développement économique (par exemple pour un État) ou d’être dans une situation financière favorable.
Malgré cette croissance jamais vue, les dirigeants américains mettent en place des mesures protectionnistes qui créent des barrières lors des échanges commerciaux avec les autres pays.
De plus, dès 1925, la mécanisation de l’agriculture cause une surproduction. Les petits producteurs agricoles connaissent des baisses de salaires importantes. Plusieurs quittent les campagnes pour aller habiter dans les villes. L’exode rural est si fort qu’on estime que 60 000 personnes quittent les campagnes chaque année.
La surproduction ne touche pas que le domaine de l’agriculture. D’autres industries sont touchées et tombent en surplus de production. C’est le cas, par exemple, de l’industrie automobile en 1928. L’offre étant plus grande que la demande, les marchés ont des surplus importants. Cependant, les exportations permettent quand même de vendre ces surplus à l’étranger. La hausse de biens produits aux États-Unis atteint un sommet en 1925.
Oldsmobile (Olds automobiles) est l’un des producteurs d’automobiles dans les années 1920.
Source : Science, Industry and Business Library: General Collection, The New York Public Library. (1928). 1928 - Oldsmobile - Model F-28, Landau Sedan, 6 cylinder.
En 1926, la situation économique commence à montrer des signes de faiblesse. La croissance est trop rapide, le crédit se développe de manière désordonnée et les consommateurs ainsi que les dirigeants ont une confiance absolue dans le libéralisme. Le gouvernement n'intervient donc pas dans le système économique.
La spéculation augmente sans cesse. Les investisseurs empruntent pour se procurer des actions à la bourse en comptant sur la hausse des prix. En revendant leur action, ils peuvent rembourser leur prêt tout en faisant des profits. Face à cela, en 1927, devant l’utilisation croissante du crédit (emprunt d’argent) et devant l’exportation des capitaux à l’étranger (des montants d’argent sont investis à l’extérieur des États-Unis), les banques n’ont pas eu d’autre choix que d’augmenter les taux d’intérêt.
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La spéculation désigne le fait de faire des opérations financières en essayant d’en prévoir les prix dans le but de profiter des variations du marché. Cela peut être d’acheter alors que les prix sont bas et de vendre lorsque les prix sont élevés afin de faire un grand profit.
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Les actions sont des titres de propriété qui représentent une partie du capital d'une entreprise.
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Les capitaux sont les biens ou les montants d’argent possédés par une personne, une entreprise ou un État. Les capitaux peuvent notamment servir à effectuer des investissements.
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Le taux d’intérêt fait référence au montant qu’une personne ou une institution doit payer pour avoir accès à un prêt. Ce montant est calculé en pourcentage.
Les usines produisent plus que ce que la population peut acheter. Les stocks de produits disponibles grimpent, tandis que la production industrielle baisse fortement, entrainant une baisse des prix et des profits. Les dépenses en construction chutent, tout comme les ventes d’automobiles. Les autres domaines de production suivent rapidement. Pendant ce temps, le commerce extérieur est encore limité par les mesures protectionnistes, ce qui n’aide pas à vendre les stocks de produits en surplus. Peu à peu, les consommateurs et les institutions financières perdent confiance et hésitent à investir de nouveau.
Malgré les actions du gouvernement pour tenter de corriger la situation (en imposant des décrets sur les prix et en instaurant des programmes de travaux publics pour maintenir le taux d’emploi), la situation empire. À la veille de la crise économique, tous les éléments sont en place pour provoquer le krach boursier. C’est le 24 octobre 1929 qu’il se déclenche.
Lorsqu’ils constatent une baisse de production, les investisseurs commencent à pressentir que la valeur des actions qu’ils possèdent n'augmentera pas continuellement. C’est pourquoi plusieurs investisseurs cherchent à vendre leurs actions. Le nombre d’actions mises en vente atteint un niveau record le jeudi 24 octobre 1929. Ce jour-là, à la Bourse de Wall Street, près de 13 millions d’actions sont en vente.
L’offre est alors immense tandis que la demande est en baisse. Les prix s’effondrent rapidement devant le manque d’acheteurs pour les actions. C’est lors de cette journée, dorénavant surnommée le jeudi noir, que la Bourse de Wall Street s’effondre.
La baisse du prix des actions se poursuit dans les jours suivants, semant un vent de panique chez les investisseurs, à un point tel que, le mardi 29 octobre 1929, ce sont 33 millions d’actions qui sont mises en vente.
Pendant une semaine, les actions sont vendues à des prix très bas. Personne ne veut acheter des actions dont le prix ne fait que baisser. Jusqu’à la fin du mois de novembre 1929, les prix chutent.
La société américaine entre alors dans ce qui devient une dépression économique durable qui a des effets majeurs sur l’économie mondiale.
Les premières personnes à subir le contrecoup de l’effondrement de la Bourse sont les investisseurs. La plupart d’entre eux ont emprunté de l’argent pour investir à la Bourse. La vente au rabais de leurs actions ne leur laisse pas suffisamment de fonds (d’argent) pour rembourser les prêts obtenus des banques. Comme les prêts ne peuvent pas être remboursés, plusieurs banques font alors faillite puisqu’elles n’ont plus les fonds nécessaires pour fonctionner.
Perdant confiance dans le système économique, les épargnants (ceux qui ont mis de l’argent de côté) veulent retirer tous leurs avoirs des banques. Ne pouvant pas répondre à toutes ces demandes de retrait, plusieurs autres banques déclarent aussi faillite.
La consommation (la demande de biens et de services) chute radicalement en raison des problèmes économiques. Cela fait cesser la production des entreprises. Toute la production industrielle s’effondre donc rapidement. Les prix des produits faits en usine et des produits agricoles chutent ainsi à leur tour.
Le chômage désigne une période pendant laquelle une personne est sans emploi, mais où elle est apte à travailler et cherche activement un emploi.
Face à la fermeture des usines, des milliers d’employés se trouvent sans emploi. En quelques mois, on dénombre pas moins de 13 millions de chômeurs aux États-Unis. Cela représente 25 % de la population active (soit un travailleur sur quatre) de cette période.
À l’époque, il n’y a pas d’assurance-chômage. Pour survivre, les chômeurs doivent faire appel à la charité publique, comme les soupes populaires.
Comme la production industrielle américaine occupe une place importante dans les marchés internationaux, la crise américaine se propage rapidement dans le monde industrialisé. En Allemagne, par exemple, le chômage frappe la population aussi fortement qu’aux États-Unis. Cela favorise la montée de la popularité d’Adolf Hitler et de ses idées.
Par ailleurs, la crise américaine fait fortement baisser les exportations. En conséquence, les pays dont l’économie dépend de la production américaine sont ruinés. Au même moment, les investisseurs américains rapatrient les capitaux (les montants d’argent) qu’ils ont investis à l’étranger. Les banques étrangères sont donc touchées à leur tour, ce qui provoque de nouvelles faillites.
Au moment de la Grande Dépression, la monnaie de référence est l’étalon-or du Royaume-Uni. Par contre, face à toutes les faillites, la monnaie britannique perd rapidement de sa valeur. En conséquence, toutes les monnaies dont la valeur était fixée en fonction de l’étalon-or perdent de la valeur. La perte de valeur de la monnaie de référence, la baisse des exportations et la faillite des banques mettent pratiquement fin au commerce mondial.
Comme la monnaie de référence est abandonnée, les différents pays se regroupent autour de plusieurs autres monnaies de référence. Les pays d’Amérique s'allient autour du dollar américain, tandis que le Royaume-Uni et son empire utilisent la livre sterling. D’autres pays se rabattent sur la valeur de l’or. Cette fragmentation détériore rapidement tout le réseau de relations économiques entre les pays. Le système monétaire international s'effondre, entrainant de graves conséquences.
Le système monétaire international fait référence, entre autres, à tout ce qui touche l'interaction des monnaies des différents pays, comme le taux de change entre les monnaies. Il touche aussi au mouvement des capitaux (mouvement de montants d’argent) entre les États et les éléments permettant du crédit (l’emprunt d’argent). En résumé, le terme englobe de manière générale les opérations financières entre les États.
Face aux nombreuses conséquences des problèmes économiques, la situation de crise économique ne s'améliore pas, au contraire. La consommation, les investissements et la production en sont tous affectés à la baisse. La crise économique devient alors une dépression économique.
Les problèmes économiques ont de nombreux impacts. Seulement aux États-Unis, au début de la crise économique, 85 000 entreprises font faillite, 25 % de la population active est encore au chômage et 2 millions d’Américains sont sans-abris. Le fonctionnement du crédit est resserré, ce qui fait en sorte de rendre difficile l’emprunt d’argent.
Plus la crise économique perdure, plus la situation sociale est difficile : agitation sociale, mécontentement général, suicides, chômeurs qui errent dans les rues, etc.
Sur l’une des pancartes, on peut lire : « Nous voulons être des citoyens, pas des travailleurs de courte durée » (traduction libre).
Source : Membres de la Single Men's Unemployed Association se dirigeant vers l'Église unie de la rue Bathurst [Photographie], v. 1930, Bibliothèque et archives Canada, (URL).
Le président américain Herbert Hoover, en poste de 1929 à 1933, tente de mettre en place des mesures d’urgence. Cependant, le président est convaincu que les affaires reprendront d’elles-mêmes. Au cœur de la dépression, les élections de 1932 portent un nouveau président, Franklin D. Roosevelt, au pouvoir.
Dès son arrivée à la Maison-Blanche, Roosevelt met en place une série de réformes et de programmes nationaux, surnommés le New Deal. Ceux-ci sont créés pour réduire les conséquences négatives de la crise, entre autres en ajoutant des règles au domaine bancaire afin d’éviter un nouvel effondrement comme celui vécu en 1929 et en instaurant des programmes d’aide pour les personnes âgées et les veuves.
Source : Franklin Delano Roosevelt [Photographie], Hound, P., 1933, Wikimedia Commons, (URL). CC BY 3.0.
La Tennessee Valley Authority dont il est question ici est une organisation créée pour soutenir le développement économique de la vallée du Tennessee, une région gravement touchée par la crise économique.
Source : Huntster, Wikimedia Commons
De plus, le président Roosevelt lance plusieurs chantiers de construction d’infrastructures comme des routes, des barrages hydroélectriques ou encore des ponts pour donner de l’emploi à ceux qui n’en ont plus. Plusieurs de ces infrastructures sont encore utilisées aujourd’hui.
Le Canada met aussi en place des mesures pour redresser l’économie. Pour en apprendre plus à ce sujet, consulte la fiche sur la remise en question du capitalisme.
Les impacts du New Deal sur la fin de la crise aux États-Unis sont difficiles à séparer des effets de l'économie de guerre mise en place lors de la Deuxième Guerre mondiale. Il est donc complexe d'établir précisément ce qui a permis de mettre fin à la Grande Dépression. En effet, la Deuxième Guerre mondiale éclate alors que le New Deal n’est réellement actif que depuis deux ans.
L’économie de guerre et l’industrie de l’armement jouent un rôle majeur dans la relance économique mondiale. Par exemple, l’Allemagne et l’Italie, en établissant de grands programmes d’armement et de construction nationale, se remettent de la crise économique avant même le début de la guerre. Dans le cas des États-Unis, la guerre aide à mettre fin à la crise puisqu’elle relance la production industrielle, ce qui crée des emplois et produit de la richesse dans le pays. L’économie de guerre aide aussi le Canada à relancer son économie.
La Grande Dépression a été la plus grave crise économique de tout le 20e siècle. Son ampleur a remis en question le modèle capitaliste. Les pays communistes ont évité la crise, ce qui leur a servi d’argument en faveur de ce régime politique et économique.
Après la crise, les gouvernements ont commencé à intervenir dans l’économie pour éviter des effondrements boursiers aussi catastrophiques. Un nouveau modèle économique se développe, mettant de côté le libéralisme économique pur. C’est aussi en réponse à cette crise que les États ont commencé à mettre sur pied des mesures sociales telles que l’assurance-chômage et la sécurité sociale. Depuis, le système capitaliste est plus encadré et mieux structuré par l’État, les institutions et les syndicats.
Encore aujourd’hui, les causes profondes de la Grande Dépression sont sujettes à débats. Les économistes qui prônent les interventions gouvernementales dans l’économie affirment que la crise a été causée par l’absence d’intervention. D’un autre côté, les économistes qui sont plutôt partisans d’un libéralisme sans intervention gouvernementale défendent plutôt l’idée que ce sont les interventions faites à l’époque qui ont provoqué la crise.
Bibliothèque et archives Canada. (v. 1930). Membres de la Single Men's Unemployed Association se dirigeant vers l'Église unie de la rue Bathurst [Photographie]. https://www.bac-lac.gc.ca/eng/CollectionSearch/Pages/record.aspx?app=fonandcol&IdNumber=3630097
Hound, P., (1933). Franklin Delano Roosevelt [Photographie]. Wikimedia Commons, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:FDR_in_1933_edit.jpg
Science, Industry and Business Library: General Collection, The New York Public Library. (1928). 1928 - Oldsmobile - Model F-28, Landau Sedan, 6 cylinder [Photographie]. https://digitalcollections.nypl.org/items/510d47db-bac2-a3d9-e040-e00a18064a99