Le pléonasme est une figure de style d’insistance qui consiste à rapprocher deux mots, groupes de mots ou expressions qui ont des sens répétitifs dans un but stylistique. On peut le retrouver dans différents types de textes.
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« Le sang, à l’intérieur de ses veines, était littéralement en train de bouillir. »
— Les moustiques, p. 12, Jocelyn Boisvert[1] -
« C’est tenir un propos de sens bien dépourvu.
Je l’ai vu, dis-je, de mes propres yeux vu »
— Le Tartuffe, p. 122, Molière[2] -
« depuis
toujours
tout
m’inquiète
les bruits
la nuit
demain
l’infini (mourir pour toujours) »
— Kaléidoscope mon cœur, p. 22, Kristina Gauthier-Landry[3]
Pour repérer un pléonasme, on doit porter une attention particulière aux mots, aux groupes de mots ou aux expressions qui ont des sens répétitifs et qui se trouvent dans le même groupe de mots, la même phrase ou le même vers. Autrement dit, un pléonasme consiste à répéter en d’autres mots ce qui est déjà exprimé par un autre terme.
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« C’est un pauvre petit oiseau malheureux, avait expliqué la vieille. Elle va trouver dure la vie au couvent. »
— Jeanne, fille du Roy, p. 9, Suzanne Martel[4]Dans cet extrait de roman, il y a un pléonasme, car les mots pauvre et malheureux ont des sens répétitifs. En effet, dans ce contexte, pauvre signifie misérable, tout comme malheureux.
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« Bientôt j’retourne à la vraie vie »
— La vraie vie, Bigflo et Oli[5]Dans ce vers de chanson, il y a un pléonasme, car les mots vraie et vie ont des sens répétitifs. En effet, la vie est un concept appartenant au réel, donc à ce qui est vrai.
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Faire dresser les cheveux sur la tête.
Dans cette expression, il y a un pléonasme, car le mot cheveux et le groupe de mots sur la tête ont des sens répétitifs. En effet, les cheveux se trouvent nécessairement sur la tête.
Un pléonasme n’est pas toujours considéré comme une figure de style. Au contraire, il est souvent critiqué dans le langage courant ou dans un contexte non littéraire. Pour qu’il soit une figure de style, il doit avoir un but stylistique, c’est-à-dire qu’il doit être employé dans l’intention d’insister sur des mots ou sur une idée afin de renforcer un message ou de créer une image.
Ex. :
Dans notre société actuelle, l’environnement devrait être une priorité. (Phrase incorrecte)
Dans la société actuelle, l’environnement devrait être une priorité. (Phrase correcte)
Dans notre société, l’environnement devrait être une priorité. (Phrase correcte)
Dans cet exemple, le pléonasme est critiqué, car il n’ajoute aucun style au texte. En effet, l’adjectif actuelle et le déterminant possessif notre signifient tous deux qu’il s’agit de la société présente. C’est donc une expression fautive à remplacer par la société actuelle ou par notre société.
Voici d’autres exemples de pléonasmes à éviter : sortir dehors, monter en haut, descendre en bas, marcher à pied, comme par exemple, inné en nous, abus excessif, prévoir d’avance, etc.
Certains pléonasmes sont employés si souvent dans le langage courant qu’ils sont considérés comme des expressions figées.
Ex. :
tourner en rond, avoir une tête sur les épaules, vivre sa vie, voir de ses propres yeux, etc.
Le pléonasme est une figure d’insistance qui sert à mettre l’accent sur certains éléments dans différents types de textes. Il peut donc, entre autres, rendre une image plus évocatrice, préciser une idée, attirer l’attention du lecteur ou de la lectrice ou les convaincre de la pertinence d’un propos. Il peut également avoir un effet humoristique.
Lorsqu’on interprète un pléonasme, il faut émettre une hypothèse sur son sens en faisant un lien entre l’effet créé par le rapprochement des idées répétées et le contexte de l’œuvre. Voici un exemple de question d’interprétation portant sur un extrait de texte et des pistes de réponses possibles.
Dans cet extrait d’une légende intitulée Le loup-garou, le narrateur raconte à ses interlocuteurs une histoire qu’a vécue son père, qui aurait vu des loups-garous. Selon toi, quel est l’effet créé par le pléonasme qui s’y trouve?
« Eh bien ! arrêtez un peu, je n’ai pas fini et j’en ai une autre que mon défunt père m’a racontée, ce soir-là, en montant à Montréal à bord de son bateau. C’est une histoire qui lui est arrivée à lui-même et […] je me fâcherai un peu sérieusement si vous faites seulement semblant d’en douter. »
— « Le loup-garou » par Honoré Beaugrand, p. 73, dans Contes et légendes du Québec[6]
Pistes de réponses possibles
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Effet d’insistance sur la véracité de l’histoire
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Désir de persuader ses interlocuteurs
Selon moi, le pléonasme crée un effet d’insistance sur la véracité des propos du narrateur. En effet, il veut tellement convaincre ses interlocuteurs que son histoire est vraie qu’il répète lui et lui-même, démontrant ainsi ce que son père a réellement vécu. Le narrateur insiste donc sur le fait qu’il connait la personne à qui est arrivée la mésaventure pour s’assurer qu’on ne puisse pas douter de lui.
Il existe d’autres figures d’insistance.
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Boisvert, J. (2017). Les moustiques. Soulières éditeur.
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Molière. (2003). Le Tartuffe. Éditions Beauchemin.
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Gauthier-Landry, K. (2022). Kaléidoscope mon cœur. Éditions du Boréal.
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Martel, S. (1999). Jeanne, fille du Roy. Éditions Fides.
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Bigflo et Oli. (2017). La vraie vie. [Enregistrement sonore]. La vraie vie, Polydor.
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Ouellette, A.-C. et Vézina, A. (2010). Contes et légendes du Québec. Éditions Beauchemin.