La répétition est une figure de style d’insistance qui consiste à répéter un mot, une expression ou un groupe de mots dans différents types de textes.
-
« Impossible de se promener aujourd’hui. Ni dans les couloirs de l’école, ni dans la cour, ni même dans les escaliers du fond, ceux qui mènent au local d’arts plastiques et qui sentent le lait caillé. »
— Jane, le renard et moi, p.9-10, Fanny Britt[1] -
« C’est un peu vide chez moi, le soir du premier match de la saison, quand l’ami de toujours ne se pointe pas, quand la tradition se détraditionne, c’est un peu vide chez moi. »
— Ça sent la coupe, p.15, Matthieu Simard[2]
Pour repérer une répétition, il faut porter une attention particulière aux mots, aux expressions ou aux groupes de mots qui se répètent. Parfois, ces éléments peuvent être énumérés. On peut en retrouver…
-
… dans une même phrase;
-
… dans un même paragraphe;
-
… dans un même vers;
-
… dans une même strophe.
-
« Je ressens ce pays physiquement. Jusqu’au talon. Je reconnais, ici, chaque son, chaque cri, chaque rire, chaque silence. »
— Pays sans chapeau, p.11, Dany Laferrière[3]
Dans cet extrait de roman, il y a une répétition du déterminant chaque, intégrée dans une phrase grâce à une énumération. -
« Je me suis fait avoir. Papa s’est fait avoir. Maman aussi. Nous nous sommes tous fait avoir. »
— Entre ici et là-bas, p.11, Michèle Matteau[4]Dans cet extrait de roman, il y a une répétition de l’expression se faire avoir dans un paragraphe.
-
« Je suis partie longtemps
Longtemps, c’est long, longtemps
Je suis partie longtemps
J’ai frôlé la mort plus souvent que la vie »
— Umami, Klô Pelgag[5]Dans cet extrait de chanson, il y a une répétition de l’adverbe longtemps dans une strophe.
Une répétition doit être écrite avec une intention précise. Il ne faut donc pas la confondre avec un manque de vocabulaire qui ne crée aucun effet et qui affecte la cohérence textuelle.
Pour en savoir plus sur la façon de reprendre l’information dans un texte afin d’assurer une progression de l’information efficace, consulte la fiche La reprise de l’information.
L’anaphore est aussi une répétition. Sa particularité est que les mots répétés se retrouvent en début de phrase, de paragraphe ou de vers.
Ex. :
« Sous l’eau
je retiens ma respiration
les yeux ouverts sur le grand vide vert
je suis seule
je suis sourde
je suis muette
je suis petite
je suis floue
un vrai poisson rouge dans mon bocal. »
— Les poèmes ne me font pas peur, p.39, Laurent Theillet[6]
Pour en savoir plus sur cette figure de style, consulte la fiche L’anaphore.
La répétition est une figure d’insistance qui sert à mettre l’accent sur certains éléments dans différents types de textes (roman, chanson, poème). Voici quelques exemples d’effets qu’une répétition peut créer.
Principal effet produit par une répétition |
Exemples |
Insister sur un état psychologique |
« Mon petit frère venait tout juste d’avoir quatre ans et il pleurait. C’est ce qu’il faisait toujours, pleurer. Le matin, il pleurait, L’après-midi, il pleurait. Il pleurait même en mangeant, même en dormant, même quand il faisait beau soleil et que tout le monde était content en se disant bonjour. » |
Insister sur une description |
« À l’époque dont nous parlons, il régnait dans les villes une puanteur à peine imaginable pour les modernes que nous sommes. Les rues puaient le fumier, les arrière-cours puaient l’urine, les cages d’escalier puaient le bois moisi et la crotte de rat, les cuisines le chou pourri et la graisse de mouton ; les pièces d’habitation mal aérées puaient la poussière renfermée, les chambres à coucher puaient les draps graisseux, les courtepointes moites et le remugle âcre des pots de chambre. » Dans cet extrait, la répétition du verbe puaient permet d’amplifier la description de la puanteur qui régnait dans les villes au 18e siècle. |
Insister sur un thème |
« Ce n’était qu’un orage Dans cet extrait, la répétition du mot liberté contribue à insister sur le thème central du poème et à mettre l’accent sur le message d’espoir qui se dégage de la chanson. |
Créer une accumulation |
« Les filles ne vivent pas une réalité uniforme, ce sont des filles gaies, des filles trans, des filles queer, des filles autochtones, des filles tristes, des filles malades, des filles pauvres ou aisées, des filles immigrantes, des filles racisées, des filles blanches, des filles de la ville, de banlieue, de région ou de la campagne, des filles handicapées, des filles grandes ou petites, des filles véganes, des filles militantes, affirmées ou timides… » Dans cet extrait, la répétition du nom filles suivi d’une caractéristique chaque fois différente crée un effet d’accumulation démontrant qu’il y a de nombreux types de filles qui sont toutes aussi uniques et importantes. |
Créer un effet sonore |
« Tu ferais une super maman, mais pas maintenant, non pas maintenant Dans cet extrait, les répétitions de l’expression pas maintenant et de l’adverbe non créent un effet sonore rythmique en lien avec le thème de la chanson. |
Un même son peut être répété dans un texte. Cette figure de style est appelée assonance ou allitération, selon le type de son répété.
Ex. :
« Berçons-nous comme des amoureux
Comme si ce n'était qu'un jeu
Et que tout pouvait changer
Si on jouait bien les dés
On s'est laissé faner sous
Les ciels bleus de nos yeux doux »
— Les Échardes, Charlotte Cardin[12]
Dans cette chanson, il y a une assonance, car le son vocalique ou est répété au fil des vers.
Pour en savoir plus sur ces figures de style, consulte la fiche L’allitération et l’assonance.
Lorsqu’on interprète une répétition, il faut émettre une hypothèse sur son sens en faisant un lien entre l’effet créé par l’élément répété et le contexte de l’œuvre. Voici des exemples de questions d’interprétation portant sur des extraits de textes et des pistes de réponses possibles.
Dans l’extrait du roman Cap-aux-Esprits, on présente Simon, le personnage principal, qui accepte difficilement son déménagement. Le narrateur partage les pensées de Simon, en rappelant certaines interventions qu’il a subies, mais qui ne semblent pas justifier un déménagement selon lui. À ton avis, quel effet est produit par la répétition du nom Simon?
« Il n’avait quand même rien fait de grave. Il ne méritait pas ça. Mais tout le monde était contre lui. Dans sa tête, les voix de son passé récent se bousculaient – celles de sa mère, du juge, de la psychologue… Ce sera bon pour toi, Simon… Tu dois reprendre ta vie en mains, Simon… Je t’impose des travaux communautaires pour cette fois, Simon, mais si je te revois devant ce Tribunal… Tu dois apprendre à exprimer tes émotions, Simon… Au fond, je sais que tu es une bonne personne, Simon… Moi, je crois en toi, Simon… Tu as juste besoin d’un peu d’encadrement, Simon… Et blablabla, et blablabla… »
— Cap-aux-esprits, p.15, Hervé Gagnon[13]
Pistes de réponses possibles
-
Effet d’insistance sur les nombreux conseils et avertissements donnés à Simon
-
Mise en évidence du sentiment d’agacement de Simon
Selon moi, la répétition du nom Simon crée un effet d’insistance sur les nombreuses interventions qu’il semble avoir subies. En effet, grâce à la répétition, même si on ne sait pas quel geste il a commis, on comprend que plusieurs personnes ont tenté de lui donner des conseils et des avertissements. Ainsi, la répétition met l’accent sur son sentiment d’agacement par rapport à toutes les fois où on lui a dit quoi faire ou comment se comporter.
Dans cet extrait de pièce de théâtre, quatre femmes s’expriment en chœur sur la réalité d’une mère dans les années 60-70 au Québec. Elles énumèrent les tâches de leur routine quotidienne. D’après toi, qu’est-ce que cette répétition évoque par rapport aux émotions des personnages féminins de l’époque?
« Chus tannée de mener une maudite vie plate! Une maudite vie plate! Une maudite vie plate! Une maud… »
— Les Belles-Sœurs, p.24, Michel Tremblay[14]
Pistes de réponses possibles
-
Mise en évidence de l’épuisement des femmes
-
Effet d’insistance sur leur vision négative de leur quotidien
-
Intensité de leur sentiment de découragement
D’après moi, la répétition de l’expression une maudite vie plate nous indique combien les femmes sont épuisées de toute la charge qu’elles ont au quotidien. En effet, en étant répétées à plusieurs reprises, leurs paroles deviennent comme un cri du cœur pour dire que leur vie est difficile et peu divertissante. On ressent donc l’intensité de leurs émotions et leur exaspération.
Il existe d’autres figures de style d’insistance.
1. Britt, F. et Arsenault, I. (2012). Jane, le renard et moi. Éditions de la Pastèque.
2. Simard, M. (2017). Ça sent la coupe. Éditions internationales Alain Stanké.
3. Laferrière, D. (2006). Pays sans chapeau. Éditions du Boréal.
4. Matteau, M. (2019). Entre ici et là-bas. Éditions David.
5. Klô Pelgag. (2020). Umami. [Enregistrement sonore]. Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, Secret City.
6. Theillet, L. (2015). Les poèmes ne me font pas peur. Éditions Boréal.
7. Boulay, S. et Bray-Bourret, A. (2018). Anatole qui ne séchait jamais. Éditions Fonfon.
8. Süskind, P. (1985). Le parfum. Éditions Fayard.
9. Desjardins, R. (1988). Le cœur est un oiseau. [Enregistrement sonore]. Les Derniers Humains, Ariola Records.
10. De Pesloüan, L. et Darling, G. (2017). Pourquoi les filles ont mal au ventre?. Éditions de l’Isatis.
11. Moffat, A. (2002). Poussière d’ange. [Enregistrement sonore]. Aquanaute, Audiogram.
12. Cardin, C. (2016). Les Échardes. [Enregistrement sonore] Big Boy.
13. Gagnon, H. (2007). Cap-aux-esprits. Éditions Vents d’Ouest.
14. Tremblay, M. (1972). Les Belles-Sœurs. Leméac Éditeur.