L’allégorie est une figure de style d’analogie qui consiste à rendre concret un concept abstrait, généralement à l’aide d’une personnification. Une allégorie peut être développée dans une séquence descriptive, une partie de texte ou un texte complet.
« C’est un petit bonheur que j’avais ramassé
Il était tout en pleurs sur le bord d’un fossé
Quand il m’a vu passer, il s’est mis à crier
"Monsieur ramassez-moi, chez vous emmenez-moi
Mes frères m’ont oublié, je suis tombé, je suis malade
Si vous n’me cueillez point, je vais mourir quelle balade
Je me ferai petit, tendre et soumis, je vous le jure
Monsieur, je vous en prie, délivrez-moi de ma torture" »
— Le p’tit bonheur, Félix Leclerc[1]
Cet extrait de chanson est une allégorie dans laquelle le bonheur, un concept abstrait, est rendu concret à l’aide d’une personnification.
Pour repérer une allégorie, il faut porter une attention particulière à un élément abstrait (le temps, l’amour, la mort, la tristesse, la justice, etc.) qui est imagé par des symboles (un objet, une plante, un animal, un humain, etc.) pour le rendre concret. Ces symboles ont un sens figuré, c’est-à-dire qu’ils représentent autre chose que leur sens premier. Ils servent plutôt à caractériser l’élément abstrait.
« Il m’envahit, m’étouffe, me prend de l’intérieur
Et m’entraîne malgré moi là où je n’voudrais pas
Il m’écorche et me mord
Il me brûle et me tord
Pour qu’jamais je n’l’oublie, il me suit dans mon lit
Et me garde éveillé
L’amour qu’j’n’ai pas donné »
— L’amour que j’n’ai pas donné, Luc De Larochellière[2]
Dans cet extrait de chanson, on retrouve une allégorie, puisque l’amour, un concept abstrait, est rendu concret grâce à une personnification. En effet, on lui donne des comportements humains comme le fait qu’il envahit, étouffe, entraîne, écorche, mord, brûle, tord, suit et garde éveillé l’énonciateur. Ces symboles permettent de représenter de nombreuses caractéristiques de l’amour.
L’élément abstrait est parfois implicite, c’est-à-dire qu’il faut le déduire à l’aide des indices et des symboles présents dans le texte.
Ex. :
« Aujourd’hui ELLE est revenue. […]
Je suis désespérée, car à chaque fois, elle sabote ma journée.
Il est 8 heures et demie! Tu vas être en retard!
ELLE empiète sur mes tartines et envahit ma tasse de lait.
Je vous dis pas comme ça complique mon petit déjeuner.
Chaque petit geste du matin
est un obstacle, une épreuve.
Si encore elle m’attendait gentiment à la maison,
mais non, ELLE est du genre collant.
ELLE m’empêche d’atteindre l’école avant la sonnerie.
Je sais ce que vous pensez : j’ai l’air de trainasser.
Mais madame est lourde à porter. »
— Madame la flemme, Mayana Itoïz[3]
Dans cet extrait d’album jeunesse, on retrouve une allégorie dans laquelle l’élément abstrait est implicite. On devine qu’il s’agit de la paresse grâce aux indices présents dans le texte (Il est 8 heures et demie, la narratrice va être en retard) et aux symboles qui forment une personnification. On personnifie la paresse en écrivant, par exemple, qu’elle sabote une journée, empiète sur des tartines, envahit une tasse de lait, est du genre collant et est lourde à porter. On peut donc comprendre que ces comportements et ces caractéristiques humaines sont des symboles pour décrire de façon concrète la paresse qui prend le contrôle de la vie de la narratrice.
La personnification est également une figure d’analogie. Contrairement à l’allégorie, la personnification ne rend pas toujours concret un élément abstrait.
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Allégorie |
Personnification |
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« Je crois que la guerre et la paix sont en fait des amies qui se moquent de nous. Elles nous traitent en ennemis quand ça leur plait, comme ça leur convient […] »
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« La télévision n’est pas seulement devenue notre écran de fumée, mais notre gardienne, notre éducatrice et notre seule amie. » Dans cette personnification, l’élément auquel on donne des caractéristiques humaines est la télévision, un objet concret. |
L’allégorie est une figure d’analogie, car elle rapproche deux éléments pour en dégager des ressemblances. Pour bien comprendre cette figure de style, il faut être capable d’identifier l’élément abstrait qu’on a rendu concret et se questionner sur ce que symbolise l’élément concret choisi pour l’illustrer.
L’allégorie permet au lecteur ou à la lectrice, grâce à sa symbolique, de réfléchir à un concept abstrait, comme une valeur, une émotion ou un sentiment. Elle peut donc, entre autres, permettre de dénoncer une situation, de démontrer l’importance d’un élément, d’émouvoir ou de proposer une manière de penser étonnante.
Lorsqu’on interprète une allégorie, il faut tenter d’émettre une hypothèse sur son sens et sa symbolique en se basant sur l’effet créé et le contexte de l’œuvre. Voici un exemple de question d’interprétation à partir d’un extrait de texte et des pistes de réponses possibles.
Dans cet extrait du slam Rencontres, le narrateur résume l’une des rencontres qu’il a faites sur son chemin. Selon toi, que symbolise l’allégorie présente dans cet extrait?
« À un moment sur ma route, j'ai rencontré l'amour
Je lui ai dit: "tiens, tu tombes bien, je veux te parler depuis toujours
Dans l'absolu, t'es une bonne idée mais dans les faits, c'est un peu nul
Tu pars en couille une fois sur deux, faudrais que tu retravailles ta formule"
L'amour m'a dit: "écoute petit, ça fait des siècles que je fais mon taf
Alors, tu me parles sur un autre ton si tu veux pas te manger des baffes
Moi, je veux bien être gentille mais faut que chacun y mette du sien
Les humains ne font aucun effort, et moi, je suis pas un magicien" »
— Rencontres, Grand Corps Malade[6]
Pistes de réponses possibles
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Rencontre symbolique avec l’amour
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Perception négative de l’amour au départ
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Réflexion sur le rôle à jouer pour vivre l’amour
Selon moi, l’allégorie symbolise une rencontre étonnante avec l’amour qui fait réfléchir le lecteur ou la lectrice sur ce thème et sur son rôle à jouer pour vivre cette émotion. En effet, grâce à la personnification qui rend l’amour concret, le narrateur peut avoir une conversation avec celui-ci et lui dire qu’il le trouve décevant. L’amour, de son côté, se défend en disant j’suis pas un magicien et en expliquant que chacun doit faire un effort pour vivre une belle histoire d’amour. L’allégorie permet donc de rapprocher et de confronter deux façons de voir l’amour.
Il existe d’autres figures d’analogie.
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Leclerc, F. (1989). Le p’tit bonheur. [Enregistrement sonore]. Félix Leclerc chante ses derniers succès, Polydor.
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De Larochellière, L. (2009). L’amour que j’n’ai pas donné. [Enregistrement sonore]. Un toi dans ma tête, Disques Victoire.
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Itoïz, M. (2014). Madame la Flemme. Éditions Glénat.
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Thúy, K. (2014). Ru. Éditions Alain Stanké.
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Dawson, C. (2020). Là où je me terre. Éditions du Remue-ménage.
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Grand Corps Malade. (2006). Rencontres. [Enregistrement sonore]. Midi 20, Anouche Productions/Universal.